Psychologie humaine, par Robert Mercier

La découverte et la compréhension de la psyché profonde de l’homme a été un sujet de recherche depuis la naissance de la civilisation. Robert Mercier nous propose une présentation de cette discipline, encore jeune, qu’est la psychologie, en citant quelques-uns de ses principaux contributeurs et en expliquant les principales recherches et expériences menées dans leurs domaines respectifs. Ce livre s’adresse aux personnes désireuses d’en connaître davantage sur le fonctionnement de l’esprit humain, d’approfondir leurs connaissances d’elles -mêmes et de comprendre pourquoi une personne sera susceptible de se comporter de telle ou telle manière. La connaissance de la psychologie humaine nous permet également de voir la réalité sous une perspective plus élargie.

A partir de la seconde moitié du XIXème siècle, la médecine a développé un intérêt particulier pour le fonctionnement de la psyché, domaine d’étude réservé jusque-là aux philosophes, qui peuvent être considérés comme les précurseurs de la psychologie (citons Platon et Aristote, notamment). L’étude de la psyché rentre alors dans le domaine des sciences, particulièrement avec Darwin, qui, vers 1865, écrit un ouvrage traitant des émotions, dans lequel il expose une approche physiologique de ces dernières.

La psychologie émerge comme une science nouvelle et s’attache à étudier les comportements humains et les processus mentaux. Les professionnels de la psychologie ont constaté que les gènes et l’environnement étaient souvent impliqués dans la formation des troubles mentaux. La psychologie propose des thérapies qui n’ont pas pour but de supprimer le traumatisme mais de le travailler et de l’analyser afin qu’il ne soit plus un point de focalisation pour le patient et que ce trauma puisse être relégué dans le passé.

Sigmund Feud est considéré comme le Père de la psychanalyse, qui a constitué une transition par rapport aux méthodes de la psychologie enseignées au XIXème siècle. Freud affirmait que l’inconscient était capable d’influencer les comportements et les relations interpersonnelles des hommes ; il a introduit les notions de complexe d’Œdipe, libido, ça, moi, surmoi, transfert, projections, etc.

L’auteur dénonce certaines idées reçues, comme celle selon laquelle chaque personne aurait un hémisphère du cerveau dominant (l’hémisphère gauche pour la personne analytique et le droit pour la personne créative). Cette théorie a été discréditée par des expériences faisant appel à la résonance magnétique, qui ont démontré que nous utilisons nos deux hémisphères de façon égale.

Robert Mercier cite les exemples les plus répandus de troubles de la personnalité pathologique et leurs caractéristiques :

  • Troubles de la personnalité obsessionnelle compulsive : TOC (troubles obsessionnels compulsifs) : préoccupation excessive pour la perfection, contrôle de l’ordre, peu de flexibilité, peu de tolérance aux erreurs, tendance à travailler trop.
  • Troubles de la personnalité borderline : mauvaise capacité à réguler les émotions, sensibilité à l’abandon, éternelle solitude, instabilité des relations interpersonnelles.
  • Troubles de la personnalité schizotypique : détachement émotionnel, retrait social, pensée paranoïaque, tendance à l’introversion.
  • Trouble de la personnalité évitante : timidité, sentiment d’inadéquation, difficulté à rentrer en relation avec les autres, sensibilité excessive aux critiques.
  • Trouble de la personnalité narcissique : manque d’empathie, sentiment de supériorité, volonté d’affirmer sa propre position même en se servant des autres, extrême sensibilité aux critiques.
  • Personnalité atteinte de TSPT (trouble de stress post-traumatique) : ce trouble concerne une personne ayant subi un événement traumatique. Si le trouble n’est pas traité, il resurgit chez la personne quand elle est au contact de situations en relation avec l’événement vécu ; ce trouble peut avoir un côté viscéral et se présenter de façon multiple.

Ivan Pavlov (1849-1936) : médecin et physiologiste russe, qui, en menant des expériences avec des chiens, a démontré que la présence d’un stimulus met en marche une réponse automatique chez l’animal ; Pavlov a découvert le réflexe conditionné (réflexe de Pavlov).

John Broadus Watson (1878-1958) : psychologue américain, fondateur du behaviorisme (behaviour=comportement, en anglais), qui consistait à étudier l’individu uniquement à travers ses comportements. Ses recherches portaient sur les phénomènes d’apprentissage chez l’enfant, en tenant compte des trois émotions de base : la peur, la colère, l’amour, ces dernières étant, selon Watson, conditionnées par notre environnement. Son expérience la plus célèbre et la plus controversée est celle du « petit Albert ». Il s’est inspiré des expériences de Pavlov afin de créer chez cet enfant une phobie des rats, alors que l’enfant ne les craignait pas auparavant, ce qui lui a permis de constater que le conditionnement pouvait également s’appliquer à l’être humain.

Burrhus Frederic Skinner (1904-1990) est un psychologue américain, qui s’est inspiré des théories de ses prédécesseurs Pavlov et Watson. Au conditionnement classique pavlovien, il a ajouté le concept de « conditionnement opérant », affirmant que l’action de l’environnement après la réponse au stimulus était déterminante, pour que le stimulus devienne opérant.  L’environnement doit donc avoir des « conséquences renforçantes ». Ce psychologue a élaboré la « boîte de Skinner », un dispositif de conditionnement opérant, utilisé en laboratoire. Skinner a appliqué les principes de conditionnement opérant à la communication et aux méthodes d’apprentissage des langues. Les méthodes audio-orales des laboratoires de langues sont inspirées de ce concept.

Carl Jung (1875-1961) : psychiatre et psychanalyste suisse, qui est à l’origine des concepts d’inconscient collectif, hérité de nos ancêtres, de synchronicité, d’archétypes, de types psychologiques basés sur l’extraversion ou l’introversion révélant huit profils types, qui représentent la façon qu’a un individu de se connecter au monde. Robert Mercier affirme que de nombreux psychologues et psychanalystes actuels s’orientent vers les théories jungiennes, ce qui leur permet de prendre en compte de nombreux facteurs dans la prise en charge de leurs patients.

Jean Piaget (1896-1980) : d’origine suisse, biologiste, psychologue et épistémologue, Jean Piaget est le père du constructivisme, une théorie qui stipule que nous acquérons des expériences et formons des significations grâce à nos expériences.

Ses recherches l’ont amené à distinguer différentes phases de développement chez l’enfant :

-de 0 à 2 ans : stade sensori-moteur : utilisation des sens et des capacités motrices pour découvrir son environnement.

-stade pré-opératoire : de 2 ans à 6/7 ans : utilisation des symboles, du jeu créatif et de la décontextualisation. Pas de connexion logique entre les pensées.

-stade opératoire concret : de 6/7 ans à 11 ans : début de l’utilisation des symboles de manière logique.

-stade opératoire formel : capacité de l’enfant à utiliser la pensée abstraite et hypothético-déductive.

-à partir de 12 ans : la capacité de penser de l’enfant devient comparable à celle de l’adulte.

Piaget insiste sur l’importance de l’éducation infantile car ces années formatrices seront déterminantes pour le futur de l’enfant et chaque stade de développement impactera sa croissance émotionnelle et cognitive.

Lev Vygotski (1896-1934), né dans l’empire russe de l’époque (la Biélorussie actuelle), il a consacré ses recherches à la psychologie sociale et à l’éducation, en particulier au développement de l’enfant. Il affirmait que la psyché de l’enfant est influencée par son contexte social et son environnement ; les outils et la stimulation dont il bénéficie ont un impact sur le développement de ses facultés cognitives. Il a développé une théorie historico-culturelle du psychisme.

Alfred Adler (1870-1937), médecin et psychothérapeute d’origine autrichienne, est fondateur de la psychologie individuelle. Selon Adler, chaque patient est unique et doit être traité comme une totalité sur le plan corporel et psychique. Adler préconisait une psychologie proche de la vie réelle, vouée à comprendre les autres d’après leurs biographies, chacun présentant une histoire de vie unique. Il voulait une psychologie accessible à tous et considérait la personne comme un être social en interaction, tout en se basant sur une doctrine optimiste de l’être humain.

Lawrence Kohlberg (1927-1987), psychologue américain qui, dans le sillon de Jean Piaget, a étudié les comportements de l’enfant et a élaboré la théorie de l’évolution de la pensée morale chez l’enfant. Il proposait des histoires comportant des dilemmes moraux et analysait les réponses des enfants. Ces différents tests lui permettaient d’évaluer le stade maximal de développement moral atteint par l’enfant et ces analyses ont abouti à l’élaboration de six stades du jugement moral, qu’il a développés dans un livre intitulé « The psychology of moral development » (la psychologie du développement moral).
 

Stanley Milgram (1933-1984), psychologue social, qui a mené une étude en 1963, dont le thème était « L’étude scientifique de l’efficacité de la punition sur la mémorisation », à l’université de Yale. Cette expérience impliquait la participation d’un expérimentateur, un élève et un enseignant. L’élève et l’expérimentateur étaient des comédiens mais la personne recrutée pour être l’enseignant n’était pas au courant. L’enseignant était chargé de dicter les mots, de vérifier les réponses et en cas d’erreur, il devait envoyer une décharge électrique à l’élève, placé sur une fausse chaise électrique. Les consignes étaient données par l’expérimentateur, censé représenter l’autorité « légitime ». Les résultats ont révélé que 65% des participants ont administré la dose maximale de choc électrique aux sujets, malgré leurs supplications. Cette expérience a démontré la propension de la plupart des gens à obéir un ordre, même moralement répréhensible, s’il provient d’une autorité qu’ils jugent « légitime ». L’expérience de Milgram est l’une des plus connues, dans le domaine de la psychologie.

Carl Rogers (1902-1987), psychologue humaniste américain, fondateur de la psychologie humaniste, avec Abraham Maslow, et de l’approche fondée sur la personne. Rogers a beaucoup voyagé, notamment en Chine et s’est intéressé à la théologie. Il a développé le concept d’auto-réalisation de l’être humain et prônait l’application totale des capacités de la personne et la compréhension de ses vraies aspirations afin de l’aider à les réaliser. Il a mis en avant la détresse émotionnelle que pouvaient générer des situations dans lesquelles les valeurs de la société imposées par l’extérieur sont en inadéquation avec le propre système de valeurs intérieur d’une personne.

Abraham Maslow (1908-1970), psychologue américain, figure de proue de la psychologie humaniste, il incitait ses patients à s’engager dans un processus d’auto-réalisation. Il a élaboré une représentation pyramidale de la hiérarchie des besoins de l’être humain, interprétant sa théorie de la motivation. Cette pyramide comprend, depuis la base jusqu’au sommet les cinq groupes de besoins suivants : physiologiques ; de sécurité ; d’appartenance et d’amour ; d’estime ; d’accomplissement de soi.
 

Philip Zimbardo, né en 1933, est un psychologue social américain, connu pour avoir mené l’expérience de Stanford, en 1971. Cette mise en situation, au cours de laquelle une vingtaine d’étudiants ont tenu le rôle de détenus ou de gardiens de prison, visait à étudier l’influence du comportement des individus et son rapport à l’obéissance et à l’autorité. Elle avait également pour objectif de dénoncer la violence en milieu carcéral. Philip Zimbardo est l’auteur de nombreux ouvrages, dont « The Lucifer effect, understanding how good people turn evil ». (l’effet Lucifer, comprendre comment de bonnes personnes peuvent devenir méchantes).
 

Salomon Asch (1907-1996), psychologue social, a été le professeur de Stanley Milgram, il a étudié les interactions entre les groupes sociaux et les individus. Il a constaté que de nombreux individus étaient capables de renoncer à leurs propres opinions pour se conformer au groupe et que l’effet de groupe pouvait entraîner l’oubli de l’individualité. Un individu peut ressentir le devoir de se conformer à l’opinion dominante tout en sachant que cette dernière est fausse, en sacrifiant sa propre liberté expressive.

Harry Harlow (1905-1981), psychologue social, spécialisé dans le développement cognitif et social de l’enfant, s’est inspiré des théories de l’attachement de John Bowlby. Il a réalisé des expériences avec des bébés singes rhésus, volontairement isolés de leurs mères. Ils ont reçu des mères de substitution, certains ont eu des mères en fer et en bois et d’autres des mères en tissu doux. Les bébé singes avec les mères de fer et bois ont manifesté des signes de détresse et ont présenté des diarrhées et des problèmes digestifs. Les privations subies ont eu des répercussions pendant toute leur vie ; les enfants privés de ce contact développent également des troubles émotionnels, s’ils n’ont pas eu une figure maternelle, protectrice, rassurante, apte à leur apporter un soutien émotionnel adéquat.

John Bowlby (1907-1990), médecin, psychologue et psychanalyste anglais, il recherchait l’origine des troubles des enfants et des adolescents. Ses consultations lui ont révélé qu’une rupture prolongée de la relation avec la mère au cours des cinq premières années de vie en était souvent la cause. Il a établi les bases de la théorie de l’attachement de l’enfant et a souligné l’importance de la disponibilité du « caregiver » (la personne qui donne les soins) et a révolutionné la psychiatrie et la psychanalyse des enfants. Bowlby a été élevé par une nourrice et été envoyé en pension à l’âge de sept ans.

Eric Fromm (1900-1980), sociologue et psychanalyste américain d’origine allemande, qui considérait que l’homme est constitué d’un ensemble de caractéristiques héritées et acquises. L’assimilation des éléments de son environnement et sa socialisation agissent en fonction de l’environnement où il se trouve. Fromm mentionne l’apparition chez l’homme de comportements tels que le conformisme, le masochisme, ou la destructivité, dommageables pour l’individu.

Kurt Lewin (1890-1947), psychologue américain d’origine allemande, qui s’inscrit dans la ligne de l’école de la « Gestalt theory ». Il a mené des recherches sur les groupes d’individus, en accordant une grande importance au contexte. Il a fondé des « sensitivity training group », qui est un concept de développement organisationnel ; il a également élaboré la théorie du champ et la théorie du changement. Il a créé un centre de recherche sur la dynamique des groupes au Massachussetts Institute of Technology.

Daniel Goleman, psychologue américain né en 1946, est spécialisé dans l’étude des comportements humains. Il existe, selon lui, une autre forme d’intelligence que le QI, qui est l’intelligence émotionnelle ; elle correspond à notre capacité à percevoir, maîtriser et exprimer ses propres sentiments mais aussi ceux d’autrui. L’intelligence émotionnelle permet de mieux communiquer et d’analyser son entourage social ou professionnel.

 
Howard Gardner, né en 1943, est américain, psychologue du développement et professeur des sciences de l’éducation. Ses recherches portent sur les capacités cognitives des individus et il a élaboré la théorie des intelligences multiples, qui répertorie huit formes d’intelligence : linguistique, logico-mathématiques, visuo-spatiale, musicale, kinesthésique, intrapersonnelle, interpersonnelle, naturaliste.

 
Robert Rosenthal (1933-2024), psychologue américain, a étudié le phénomène de « prophétie auto-réalisatrice » et constaté un effet circulaire entre une prophétie et la réalisation de l’événement. Effectivement, le rôle des attentes et préjugés des enseignants vis-à-vis d’un élève aurait une influence sur les résultats obtenus par l’étudiant ; des attentes élevées et un « étiquetage » positif de l’élève renforcent l’ego et peuvent améliorer ses performances.

David Rosenhan (1929-2012), psychiatre qui, en 1973, a mené des expériences portant sur la validité du diagnostic psychiatrique et qui a démontré qu’il était difficile de distinguer une personne saine d’une personne malade. Au cours de cette expérience, de faux patients ont été diagnostiqués comme étant atteints d’un trouble psychiatrique et des personnes atteintes de troubles ont été déclarées saines.

Tests de la personnalité et tests projectifs

Robert Mercier décrit dans son ouvrage des tests de la personnalité, comme le test des Big 5 ou celui de Myers-Brigg (le MBTI) ; ce dernier, élaboré d’après la théorie des types de personnalités de Carl Jung, est très utilisé dans le domaine du coaching. Il explique également les tests projectifs utilisés chez les enfants, tels que ceux de l’arbre, de la famille, ou du village.

La psychologie : une discipline qui a encore beaucoup d’avenir

La psychologie nous emmène dans une exploration de la psyché et ce périple, qui dure depuis plus de 150 ans, n’est pas près de s’achever. Cette discipline relativement jeune, qui permet d’aborder les nombreuses facettes de l’être humain, nous promet encore de belles découvertes à venir car il reste beaucoup à faire dans ce domaine. Robert Mercier, à travers son ouvrage, nous donne un bel aperçu des étapes notoires qui ont jalonné l’histoire de la psychologie.

À propos de l’auteur : 

Robert Mercier est l’auteur de nombreux livres de développement personnel. Il a écrit des ouvrages relatifs à la psychologie comportementale et à la communication, entre autres, l’art de la rhétorique, du charisme, la communication assertive, les techniques de motivation liées aux neurosciences, le langage corporel, la force mentale, la manipulation.