Le dualisme cartésien esprit-matière prévaut depuis le XVIIème siècle
Hippocrate, célèbre médecin grec de la Grèce antique, pensait déjà que nos croyances et pensées influaient sur notre bien-être. Au XVIIème siècle, le dogme dualiste de Descartes a établi une nette séparation entre l’esprit et la matière et cette vision cartésienne de l’être humain n’a depuis pas été remise en question par la communauté scientifique, dont les raisonnements sont fondés sur des preuves matérielles et objectives, préférant ignorer la participation de l’esprit dans la genèse et la guérison des maladies. La médecine moderne a tendance à se focaliser sur les organes, considérés comme des entités séparées de l’esprit de l’individu.
Des liens établis entre psychisme et système nerveux au XXème siècle
Au 20ème siècle, les recherches de Hans Selye sur le stress et de Walter Cannon sur l’homéostasie ont toutefois fourni la preuve de l’influence des pensées et des émotions sur le fonctionnement corporel. La recherche en psycho-neuro-endocrino-immunologie a également permis d’établir des liens entre le psychisme et le système nerveux, la sécrétion des hormones par les glandes endocrines et la modification du système immunitaire. Ces différentes découvertes ont révélé le caractère multidimensionnel de l’être humain. Selon Francesco Varela, neurobiologiste, l’homme n’a pas un corps mais il est un corps, qui perçoit, éprouve, pense et ce corps est parcouru d’ondes, de courants électriques, de molécules, de réactions chimiques et d’interactions électromagnétiques, au cœur même des cellules.
Des méthodes qui agissent sur la neuroplasticité du cerveau
Au cours des dernières décennies, des méthodes comme l’hypnose, le neurofeedback, la méditation, l’autosuggestion et la musicothérapie ont été reconnues comme étant bénéfiques au patient et validées scientifiquement. Elles font intervenir la neuroplasticité de notre cerveau et modifie celui-ci de façon positive. Certaines activités, comme jouer d’un instrument de musique, le piano par exemple, favorise une augmentation de la zone corticale motrice. L’imagination permet, à elle seule, de renforcer les circuits neuronaux, ce qui prouve l’importance de la visualisation, mentale, de l’attitude, des pensées et des croyances, qui peuvent modifier l’architecture du cerveau et transformer le corps tout entier. L’auteur cite Tobie Nathan, ethnopsychiatre, qui considère qu’une thérapie doit toujours être comprise comme un tout comprenant une intervention psychologique (symbolique, culturelle) et une intervention biologique (physique, chimique). À l’heure actuelle, la médecine moderne semble redécouvrir les bienfaits de certaines pratiques ancestrales traditionnelles ; des hypnosédations sont pratiquées dans certains hôpitaux et de nombreux centres de la douleur collaborent avec des hypnothérapeutes.
Francesco Varela, le neurofeedback, les dialogues « Mind & Life »
Le neurofeedback est une méthode qui permet le retour en temps réel de l’information cérébrale ; Il permet d’établir un dialogue entre l’esprit et le cerveau par l’électroencéphalographie (EEG) ou par l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ; il a été introduit par Francesco Varela, à la fin des années 1990, et s’est répandu principalement aux Etats-Unis et en Allemagne. Par la pensée, le sujet peut intensifier certaines zones de son cerveau et améliorer son état de santé (effets reconnus sur l’épilepsie, la dépression, le sommeil, la maladie de Parkinson). La méditation est une autre pratique, qui nous vient de pays asiatiques, tels que l’Inde, le Tibet, la Birmanie ou le Japon. Francesco Varela a été à l’initiative de rencontres entre scientifiques et le Dalaï Lama, appelées les dialogues « Mind & Life », qui se sont déroulées dès 1987.
Méditation et gestion du stress
Il existe deux types de méditation : fondée sur l’attention focalisée, c’est-à-dire une concentration intense sur un objet d’élection et l’attention ouverte, qui consiste à observer tout objet qui se présente à l’esprit ou aux sens. La combinaison des deux pratiques est recommandée. Le but est d’accepter ce qui est là, sans rechercher un quelconque autre bénéfice. Plus de 20000 personnes ont pu bénéficier au Etats-Unis du programme de gestion du stress MBSR (Mindful-Based-Stress-Reduction), créé par Jon Kabat-Zinn, professeur émérite de médecine. Cette pratique permet le renforcement du système immunitaire, la diminution du rythme cardiaque, de la tension artérielle, de la production de cortisol et l’amélioration des troubles anxieux. La musique a également des effets sur le cerveau ; l’écoute de la musique peut créer une résonance émotionnelle, activer les circuits de la récompense et favoriser la sécrétion de dopamine, d’endorphines, de sérotonine. La musique douce réduit le stress et l’anxiété et renforce le système immunitaire, des airs entraînants peuvent rehausser l’humeur.
Le vivant : un tout dynamique traversé par des flux
Selon Michel Le Van Quyen, le vivant est un tout dynamique dont les éléments constitutifs sont l’objet de flux permanents, tout en gardant une identité stable, et d’innombrables boucles de rétroaction biochimique combinent leurs actions pour s’adapter aux changements de leur environnement. Ceci va à l’encontre de la conception matérialiste héritée du XVIIème siècle, qui prône le morcellement de la vie en des éléments de plus en plus petits (réductionnisme) et dont l’apogée a été le séquençage du génome humain en 2001.
Pour expliquer la pensée, l’auteur nous dit qu’elle serait le résultat de l’activation en séquences d’assemblée de neurones, puis de leur désactivation, le tout formant un « noyau dynamique ». Ce phénomène s’effectue en fonction de l’histoire passée de l’individu et des situations auxquelles il est confronté. Il précise que la conscience serait issue de ce phénomène biologique d’assemblées neuronales en résonance.
L’Homme a le pouvoir de guérir et d’être son propre créateur
Les méthodes « corps-esprit » abordées par l’auteur dans cet ouvrage : l’hypnose, le neurofeedback, la méditation, l’autosuggestion requièrent l’implication du patient pour être efficaces ; elles font intervenir ses propres capacités autorégulatrices, ses croyances, son passé, ses émotions, ses ressources mentales, son envie de guérir. L’auteur reconnaît aussi que certains mécanismes de notre cerveau sont inconscients (il fait référence à Freud) et qu’ils déterminent une grande part de notre vie ; il affirme toutefois que l’homme a le pouvoir d’être son propre créateur et que sa nature lui permet d’avoir accès à un vaste champ des possibles.
À propos de l’auteur :
Michel Le Van Quyen est docteur en neurosciences, directeur de recherche à l’INSERM à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière. Il y dirige un groupe de recherche à l’Institut du cerveau et de la moëlle épinière. Il s’intéresse aux analyses mathématiques des activités du cerveau et étudie le neurofeedback. Le neurobiologiste Francesco Varela a dirigé sa thèse et l’a formé à la neurobiologie.